
Le fonds souverain saoudien, le Public Investment Fund (PIF), a profité de la chute du Nasdaq (valeurs technologiques américaines) et de Wall Street au second trimestre pour renforcer ses investissements. Il a accru ses participations dans Meta, Electronic Arts et PayPal. Il a lancé de nouveaux investissements dans Amazon, Alphabet, Starbucks, JP Morgan et BlackRock. Le fonds peut se permettre d’investir dans une conjoncture difficile. Il dispose de liquidités récurrentes (manne pétrolière, vente d’une partie des titres qu’il détient dans Aramco ) et pour plusieurs années. Il en a investi 7 milliards de dollars à contre-courant des marchés.
Selon les estimations de l’agence Bloomberg, son portefeuille d’actions américaines a perdu 7 % au second trimestre à 40 milliards de dollars, soit 6,5 % du total des actifs du fonds souverain, qui étaient de 620 milliards de dollars en mars. Ils sont investis en Arabie saoudite et à l’étranger, sur les actions, obligations, infrastructures, capital investissement… Le fonds saoudien avait enregistré un rendement élevé en 2021 . Son coup de poker lors de la crise du Covid en mars 2020 lui avait aussi rapporté gros.
MBS, le patron
Il est encouragé au plus haut niveau à prendre des risques. Le fonds souverain est dirigé depuis 2015 par Yasir Al Rumayyan , mais c’est Mohammed ben Salmane (MBS) , le prince héritier qui en est le véritable patron. Aucun placement significatif ne peut être réalisé sans son aval et notamment pour les plus « politiques » des investissements. En 2022, le PIF a investi deux milliards de dollars dans le fonds de capital-investissement de Jared Kushner , le gendre de Donald Trump.
Instrument diplomatique au service de ses intérêts, MBS veut voir le PIF à son image, décomplexé et audacieux. Il en a fait un des acteurs clefs de sa réussite personnelle et de son grand défi : la modernisation et la diversification de l’économie saoudienne. Parmi les secteurs prioritaires (énergies renouvelables, infrastructures, aérospatiale, automobile…), figurent aussi les jeux et l’e-sport qui se développent rapidement en Arabie saoudite, Au Japon, le fonds a investi 3 milliards de dollars dans Nintendo en mai après ses investissements dans Nexon et Capcom. En Suède il est actionnaire d’Embracer-group.
Automobile 2.0
Cet été, le PIF a pris une participation de 16,7 % dans Aston Martin, le constructeur automobile anglais, qui traverse une période difficile. L’année précédente, le fonds avait investi chez McLaren avec un autre fond du Golfe, Mumtalakat, de Bahreïn. Dans trois ans, Aston Martin va se lancer dans les voitures électriques, un secteur dans lequel le PIF est déjà investi au travers de sa participation massive -20 milliards de dollars – dans Lucid Motors. Il avait aussi investi par le passé dans Tesla mais la personnalité versatile d’Elon Musk avait fini par irriter les dirigeants du fonds et jusqu’à MBS. Le fonds, qui détenait 5 % du capital, a cédé progressivement ses actions pour ne plus en détenir en mars 2020. S’il avait conservé son investissement, il aurait gagné jusqu’à 50 milliards de dollars grâce à l’envolée de Tesla en 2020 et 2021 .
Al Walid : un coup de poker de 500 millions en pleine guerre en Ukraine
Le prince saoudien Al-Walid, un des plus riches hommes d’affaires du royaume, a investi 500 millions de dollars dans trois groupes russes (Gazprom, Rosneft, Lukoil) au début de la guerre en Ukraine. Placement purement financier ou soutien à la Russie, c’est sa société d’investissement Kingdom Holding qui a réalisé ces investissements. Elle compte le fonds souverain saoudien PIF comme actionnaire à hauteur de 17 % . Selon Reuters, le PIF chercherait à influer sur les investissements d’Al-Walid. Les 500 millions de dollars ont été investis non pas à la Bourse de Moscou, vite fermée après la guerre en Ukraine, mais aux Etats-Unis. Des titres (ADR) qui suivent la valeur des groupes russes sont cotés outre Atlantique. Mais les performances n’ont pas été au rendez-vous. L’ADR sur Gazprom a plongé de 88 % cette année.