
La Chine suffoque . L’ex-Empire du Milieu connaît une vague de chaleur historique, et il faut remonter à 1961 pour retrouver des traces d’une sécheresse de cette ampleur. Le fleuve Yangtsé est presque à sec au point de craqueler par endroits. Cette météo extrême n’a pas seulement un impact sur les populations mais aussi sur les matières premières. Riz, lithium et aluminium en sont les principales victimes.
Dans les régions le long du Yangtsé, les précipitations ont chuté de 45 % en juillet par rapport à leurs niveaux normaux, a indiqué le ministère de l’eau en Chine. Une catastrophe pour l’agriculture. « L’étendue rapide de la sécheresse, exacerbée par des températures élevées et des dommages causés par la chaleur, fait peser une grave menace sur la production agricole d’automne », a confirmé ce mercredi le ministère de l’Agriculture. « Les risques pesant sur les grains sont importants, car les six régions concernées représentent 48 % de la production chinoise de riz », précisent les analystes de Goldman Sachs dans une note.
La moitié de la production
La situation est si délicate pour les cultures que la Chine essaie même de déclencher des pluies en lançant de l’iodure d’argent dans les nuages. Cette situation intervient alors que les marchés des céréales sont déjà sous haute tension en raison de la guerre en Ukraine. Pékin est certes presque autosuffisant pour le riz, le blé et le maïs, mais tout manque de production locale se traduit par des achats colossaux sur les marchés internationaux. La sécurité alimentaire est un sujet sensible dans un pays encore marqué par les grandes famines, sous l’ère Mao, qui ont tué des dizaines de millions de personnes.
Le monde agricole n’est pas le seul à subir la sécheresse. Dans la métallurgie aussi, on surveille de près la météo. La fabrication de l’aluminium par électrolyse est un processus extrêmement énergivore, puisqu’il faut en Chine pas moins de 13,5 MWh pour une seule tonne de métal. Certains industriels s’amusent à dire que l’aluminium, c’est de l’électricité solide. Problème, les rivières sont à sec et les barrages ne génèrent pas assez d’électricité pour tout le monde.
Bond du lithium
Résultat, les rares électrons disponibles sont plutôt dirigés vers les climatiseurs des particuliers que vers les électrolyseurs des industriels. Les analystes de Goldman estiment que la Chine pourrait perdre 300.000 tonnes de production cette année, qui s’ajouteraient aux 360.000 tonnes déjà perdues.
L’effet sur les cours mondiaux devrait rester toutefois limité. La province du Yunan, principal hub de production, n’est pour sa part pas affectée par la sécheresse. De plus, les craintes de récession mondiale pèsent sur les prix .
Le lithium est lui aussi exposé aux coupures de courant, car le Sichuan abrite 20 % des capacités de production chinoises. L’un des géants mondiaux Tianqi Lithium a même son siège social dans la province. Depuis plusieurs jours, les producteurs ont réduit la voilure dans la production de métal blanc.
« Les stocks sont très bas, et si les perturbations se prolongent tout le mois d’août, les livraisons pour septembre pourraient être touchées », analyse Susan Zou de Rystad Energy. Les cours pourraient encore un peu plus flamber. Ils évoluent déjà de 70.000 dollars la tonne, contre 17.000 dollars l’an dernier à la même époque.