Surf. Teahupoo, la nouvelle vague olympique

Les meilleurs surfeurs du monde s’affronteront donc pour l’or olympique à Tahiti, les conventions pour l’organisation des épreuves de surf ont été signées à Papara, entre la Polynésie et le Comité d’organisation des JO de Paris 2024. « Nous allons en faire un événement à la hauteur de vos attentes », a expliqué Édouard Fritch, président de la Polynésie française, lors de la signature des trois documents avec Tony Estanguet, président de Paris-2024 et des représentants de l’État. « Depuis le 12 août, nous avons rencontré tous les acteurs sur le site. C’est un dossier qui avance bien. Des aménagements sont nécessaires, mais la plupart seront temporaires pour ne pas dénaturer les lieux. »

Record du monde de la distance

Le site sera aménagé pour accueillir 1 500 spectateurs et battra le record du monde de la distance entre l’endroit où se déroule une épreuve olympique et sa ville hôte, soit plus de 15 700 km. Pour ce qui est des aménagements – craintes des locaux –, les organisateurs devraient être logés chez l’habitant et les sportifs dans un hôtel à reconstruire, à 13 kilomètres du spot, voire sur un bateau de croisière si les travaux de réfection ne sont pas terminés. Mais au-delà de ces craintes, des fuseaux horaires et de la paperasse enfin paraphée, que cache ce spot ?

Le surf vit de vagues légendaires qui s’enroulent à travers la planète. Il y a Jaws et Pipeline à Hawaii, Mavericks au large de la Californie, Belharra au Pays basque, Nazaré au Portugal et puis… il y a Teahupoo à Tahiti – « la mâchoire de Hava’e », nom donné par les Polynésiens. C’est un monstre effrayant, bruyant, à la mâchoire aussi épaisse que celle d’un grand requin blanc. Teahupoo tire aussi son nom d’une bataille entre les deux principaux clans de cette partie de l’île – littéralement, « le mur de crânes » – te (le) ahu (mur) upo’o (crâne). Un mur aurait été bâti à l’emplacement de la séparation du territoire avec les crânes et ossements des vaincus. L’ambiance est posée. Enfin presque.

Majestueuse et dangereuse

Car la violence de la houle et la configuration du récif font qu’à 1 kilomètre de la côte un autre danger guette : une vague majes(tueuse) et dangereuse. Juste avant la barrière de corail, le fond marin passe en effet brutalement de 45 mètres à moins de 1 mètre de profondeur avec le corail à fleur d’eau. Toute la puissance de l’océan s’écrase là, en un instant. Par grosses conditions, les vagues peuvent monter jusqu’à 8 mètres de hauteur et former d’énormes tubes pouvant aller jusqu’à 5 mètres de diamètre. La légende dit que deux camions pourraient y passer sans problème ! C’est à l’intérieur de ce tunnel aquatique que les surfeurs des JO tenteront d’aligner les tubes à défaut de pouvoir y tenter d’autres manœuvres trop risquées sous un tel amas d’eau translucide.

« Teahupoo, ça s’amadoue. C’est que des tubes quand ça marche bien. C’est un spot qui peut être dangereux, qui fait peur et qui renferme des milliers d’histoires différentes. Johanne Defay

Laird Hamilton, légende dans l’imaginaire de la glisse, y a marqué l’histoire en août 2000. Il fut en effet l’un des premiers à traverser « la vague » de part en part. Elle mesurait plus de 15 mètres de hauteur et formait un tube de la taille d’un hangar. Une fois l’exploit accompli, il avait lâché : « C’est la vague la plus intense que j’aie jamais surfée. » Et pourtant, le gaillard de Hawaii, qui approche maintenant de la soixantaine, en a vu d’autres et de toutes sortes. « Teahupoo, ça s’amadoue. C’est que des tubes quand ça marche bien. C’est un spot qui peut être dangereux, qui fait peur et qui renferme des milliers d’histoires différentes », explique Johanne Defay, actuelle 2e mondiale sur le circuit professionnel. « Surfer cette vague, c’est prendre des risques, parce qu’elle creuse sur le récif et le risque de le toucher est important », raconte Kauli Vaast, l’un des meilleurs espoirs tahitiens, qui compte bien se qualifier pour les Jeux.

Après des débuts remarqués à Tokyo en 2020, le surf olympique entre donc à Teahupoo dans une nouvelle dimension, comme l’explique Tony Estanguet : « L’athlète qui sera champion olympique ici le sera sur une vague mythique. » Mais encore une fois, c’est la vague qu’y en décidera et l’Homo surfeur qui composera.

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