Le déploiement de la fibre se poursuit à un rythme soutenu dans l’Hexagone. D’après l’Arcep, le régulateur des télécoms, plus de quatre locaux sur cinq sont éligibles à cette technologie, qui doit prendre le relais de l’ADSL pour se connecter à Internet. La fibre est désormais devenu la référence, puisqu’elle totalise 51% des abonnements à haut et à très haut débit. Ce résultat est le fruit du plan France Très haut débit, qui a été initié il y a près de dix ans sous Nicolas Sarkozy, et dont les objectifs ont été repris et renforcés par François Hollande puis Emmanuel Macron. Son ambition est d’apporter un Internet à très haut débit à tous les Français d’ici à la fin de l’année, et « la fibre pour tous » à l’horizon 2025.
Ce chantier est globalement en bonne voie. Personne ne le conteste. Mais il souffre cependant d’importants problèmes de qualité et de malfaçons. En parallèle, le rythme des déploiements dans les zones dites « très denses » – c’est-à-dire les grandes villes pour l’essentiel – ralentit depuis plusieurs mois. Cette situation inquiète l’Arcep, qui redoute que certains foyers et entreprises se retrouvent sur la touche.
D’importants retards à Lille et Marseille
Dans son dernier observatoire du marché de l’Internet fixe, le régulateur n’y va pas par quatre chemins. Il affirme que « le rythme insuffisant » des déploiements de fibre « constaté dans les zones très denses ces derniers trimestres perdure ». L’évolution de la couverture de certaines villes en fibre est même au point mort. Sachant que certaines agglomérations sont franchement en retard. A l’instar de Marseille et Lille, dont les taux de couverture en fibre sont respectivement de 76% et 71% :
(Crédits: Arcep)
L’Arcep souligne aussi que, dans certains départements, comme la Meurthe-et-Moselle, le Nord ou les Bouches-du-Rhône, « la couverture en fibre optique est bien inférieure à la couverture moyenne nationale de ces zones, qui s’établit à 90% » :
(Crédits: Arcep)
Cette situation est largement critiquée par l’Avicca, une association qui rassemble les collectivités impliquées dans le numérique. Au début du mois, elle a tiré la sonnette d’alarme. Dans un communiqué, cette association, très influente dans les télécoms, a donné le ton : « Zones denses : toujours aucune perspective de complétude. » Elle y dénonce « les conséquences du désengagement progressif des opérateurs à déployer de nouvelles prises » fibre. Avant de les étriller, un à un.
« Iliad/Free s’est désengagé le premier, avec une moyenne mensuelle de 800 nouvelles prises fibre ces huit dernières années, déplore l’Avicca. Côté SFR, sur la même période, la moyenne mensuelle est de 2.300 prises, et ce chiffre n’est même plus atteint en moyenne trimestrielle. Quant à Orange, si l’opérateur historique conserve encore une capacité de production, celle-ci fond bien trop rapidement. »
Un régulateur démuni
Cette situation handicape d’abord de nombreux foyers, pour qui la perspective de bénéficier un jour de la fibre s’éloigne. L’autre problème, c’est que l’Arcep est en réalité un brin démunie. A part déplorer la situation, l’institution ne peut pas faire grand-chose. Dans les grandes villes, les Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free n’ont aucune obligation de couverture. Les zones très denses font simplement l’objet d’une « concurrence par les infrastructures ». C’est-à-dire que tous les opérateurs déploient ici leurs réseaux comme bon leur semble.
En élaborant le plan France Très haut débit, les pouvoirs publics ont estimé qu’il n’y avait pas lieu d’imposer une obligation de complétude. Ils estimaient que la couverture totale de ces territoires urbains et très peuplés ne serait pas un problème, au regard de leur forte rentabilité. Force est de constater que ce n’est pas, aujourd’hui, le cas.