
Publié le 6 sept. 2022 à 7:00
Cet été, Anne Maréchal, la directrice des affaires juridiques qui avait pris ses fonctions il y a neuf ans, a quitté l’Autorité des marchés financiers (AMF). Sa démission n’était pas passée inaperçue. D’abord, parce qu’elle s’est retrouvée en première ligne pour gérer des dossiers extrêmement sensibles comme l’affaire Veolia-Suez quand le gendarme boursier a dû arbitrer entre les deux frères ennemis en 2021. Ensuite, parce que son départ s’inscrit dans un contexte particulier : le gendarme des marchés a subi une valse de départs depuis janvier et n’a plus de président depuis la fin juillet. Arrivé au terme de son mandat de cinq ans, Robert Ophèle a dû quitter la place de la Bourse, avant que Bercy ait nommé son successeur.
Régulation
Anne Maréchal rejoint, début septembre, De Gaulle Fleurance. Ce cabinet, créé il y a vingt ans par six associés parmi lesquels figurent Louis de Gaulle et Henri-Nicolas Fleurance, compte aujourd’hui plus de 160 collaborateurs et associés inscrits au sein de douze barreaux à travers le monde (au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, en Irlande, en Belgique, au Luxembourg, au Canada, en Chine, en Tunisie ou au Liban). Pourtant, cette ancienne associée chez DLA Piper, spécialisée en droit des affaires et droit boursier ne voulait pas retourner travailler dans un cabinet d’avocats. Elle aime la régulation par-dessus tout. Cette ancienne élève de l’ENA a été administrateur civil au ministère de l’Economie et des Finances (direction de la législation fiscale) avant d’être responsable de la surveillance des marchés à la Commission des opérations de Bourse (COB), l’ancêtre de l’AMF, de 1997 à 2000.
Le projet qu’elle va développer avec De Gaulle Fleurance est justement lié à la réglementation, celle spécifique des actifs numériques. Anne Maréchal a été l’une des chevilles ouvrières de la loi Pacte de 2019, qui a instauré un cadre pour les levées de fonds par émission de jetons (Initial Coin Offering ou ICO) et pour les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN).
Situation inédite
« En 2017, à l’AMF, nous nous sommes retrouvés face à une situation inédite. Nous avons rencontré de nombreux acteurs qui voulaient lever des fonds en émettant des jetons pour mener à bien leurs projets ou proposer des services sur actifs numériques et qui nous interrogeaient sur la réglementation applicable », explique Anne Maréchal.
Or ces jetons étaient des objets juridiques totalement nouveaux, ni actions, ni obligations, ni parts de fonds, ce qui excluait l’application de la réglementation financière. « Nous aurions pu alors ne rien faire ce qui aurait freiné l’innovation, ou bien attendre des adaptations à la réglementation européenne ; ce qui aurait été très long. Finalement, nous avons choisi d’innover en créant des règles spécifiques, non contraignantes, dans un univers globalement non réglementé, pour protéger les épargnants sans faire fuir les acteurs de ce nouveau monde et conserver notre avantage compétitif en matière d’innovation dans la blockchain », ajoute-t-elle. Ce régime français innovant de la loi Pacte a ensuite fortement inspiré le règlement européen MiCa tout récemment adopté .
Au sein de la société d’avocats et de notaires De Gaulle Fleurance, Anne Maréchal va renforcer une nouvelle pratique en matière de conseil pour accompagner des clients qui veulent se lancer dans les actifs numériques, les NFT ou bien le métavers. Elle veut contribuer à faire du cabinet la référence dans ce domaine. « A l’AMF, je voyais beaucoup d’acteurs qui n’étaient pas conseillés, avec des projets non structurés. J’ai envie de les accompagner. La blockchain et le métavers, c’est l’avenir », conclut-elle.