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Il était une fois Plon la bicéphale

La scène se passe en octobre 2022 au Cardinal, « le Cardi » pour les habitués, boîte de nuit de Brive-la-Gaillarde (Corrèze) où le petit monde de l’édition se retrouve chaque année, au moment de la Foire du livre, pour des soirées chaloupées. Ce soir-là, Céline Thoulouze, directrice générale de la maison que le milieu a alors pris l’habitude d’appeler « Plon A » (« Plon Historique »), a réservé une table. Surprise… elle est déjà occupée par l’équipe de Lise Boëll, qui dirige, elle, « Plon B » (« Plon ­Tribune libre »), et qui n’a aucunement l’intention d’être délogée. Ce quiproquo résume la situation ubuesque où s’est trouvée cette filiale d’Editis pendant seize mois. Durant toute cette période, en effet, cette vénérable maison fondée en 1852 a connu deux directrices, chacune ayant sa propre équipe, ses auteurs, sa politique éditoriale.

Une scission

Les relations entre les deux patronnes de la maison – Céline Thoulouze, nommée en octobre 2020, et Lise Boëll, en novembre 2021 – avaient été marquées très vite par une extrême rivalité. Dès le mois de décembre 2021, les méthodes cassantes de la seconde – qui n’a pas souhaité ­répondre à nos sollicitations – et de ses deux adjoints avaient créé un climat si délétère que la direction d’Editis avait ­décidé de scinder la maison en deux. « Plon A » et l’équipe de Céline Thoulouze avaient conservé leurs quartiers avenue de France, au siège d’Editis, dans le 13e arrondissement de Paris, tandis que Lise Boëll et l’équipe de « Plon B » s’étaient installés rue d’Assas, dans le très chic 6e arrondissement.

Depuis, les deux entités évitaient de se croiser. Au quotidien, pourtant, les empiètements de terrain n’ont guère cessé. Les programmes de publications, censés être complémentaires, ne l’ont pas été. Dans les salons, le nombre de ­livres à promouvoir ont doublé, pas ­celui des stands. D’où ces situations loufoques : les salariés se regardaient en chiens de faïence et tentaient de trouver une petite place pour la signature de leurs auteurs… Les libraires, eux, étaient pour le moins surpris que la maison leur présente deux programmes différents pour la rentrée littéraire.

Toujours lors de la Foire du livre de Brive-la-Gaillarde, la patronne de « Plon B » s’était ostensiblement affichée avec Yannick Bolloré – PDG de Havas et fils de Vincent Bolloré. Selon l’équipe de « Plon A », elle aurait même essayé de faire en sorte qu’il ne visite pas le stand de ses concurrentes. La guerre s’était également envenimée sur les réseaux sociaux, « Plon A » protestant contre « des désépinglages réguliers » de ses posts. Des salariés de « Plon A » ont aussi accusé la patronne de l’équipe rivale de vouloir leur ravir au moins deux auteurs ou d’avoir promis à d’autres, sans en avoir le droit, un contrat pour réaliser un volume dans l’une des collections emblématiques de la maison, les « Dictionnaires amoureux ».

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