
Trois mois après son arrivée à l’Elysée, Jean Spiri, directeur de cabinet de Brigitte Macron, n’est plus certain de vouloir franchir les grilles du Palais. Dans la nuit du 14 au 15 mars, le conseiller de l’aile Est, qui avait succédé à Pierre-Olivier Costa début janvier, s’est trouvé dans une situation embarrassante. Après un moment convivial passé dans un bar de la place des Saussaies, à deux pas de l’Elysée, M. Spiri a été pris d’un malaise devant l’ambassade du Royaume-Uni, rue du Faubourg Saint-Honoré. Il se trouvait dans un état associé par les policiers à une alcoolémie aiguë.
« Je travaille à l’Elysée », a précisé ce soir-là le conseiller, avant d’être dirigé vers l’hôpital Lariboisière puis de regagner son domicile autour de 5 heures du matin. Victime d’un « black-out », selon ses dires, Jean Spiri n’a conservé aucun souvenir de cette péripétie nocturne.
L’incident remonte au Château en cette nuit fébrile, à la veille du déclenchement du 49.3 destiné à faire adopter la réforme des retraites. Alertée par le ministère de l’intérieur, la direction du cabinet d’Emmanuel Macron « réclame des comptes » dès le 15 mars à l’intéressé. L’Elysée retient une version des faits « peu avantageuse » pour M. Spiri, souligne le rapport médical de l’hôpital des armées de Percy, le 17 mars. L’examen exclut la prise de substances illicites et confirme un épisode amnésique médical.
Un mois de repos
« Oui, je suis dans un état d’anxiété, de stress et de fatigue », confirme au Monde Jean Spiri, affecté par sa mésaventure mais qui se dit soutenu par sa hiérarchie. Le cabinet, dirigé par le préfet Patrick Strzoda depuis mai 2017, a toutefois vécu le traumatisme de l’affaire Benalla – proche collaborateur d’Emmanuel Macron évincé après des violences commises en mai 2018. « L’Elysée est une maison terrible où hélas courent toutes les rumeurs… », regrette Jean Spiri, qui a pris un mois de repos, loin de Paris.
Du groupe Bolloré à la présidence de la République, le directeur de cabinet de Brigitte Macron a enchaîné « beaucoup de boulots stressants ». Des conseillers élyséens disent n’avoir perçu aucun signe avant-coureur d’un burn-out, mais soulignent que l’Elysée est « une maison particulière » qui exige de rester en alerte jour et nuit.
« J’avais quitté la politique, c’était l’occasion d’y revenir, mais peut-être suis-je davantage fait pour les livres », confie cet ancien éditeur, autrefois proche de Xavier Bertrand. A 40 ans, le normalien n’est pas sûr d’avoir « envie de replonger dans le même stress », cherche « un nouveau boulot » et aimerait « vite tourner la page ».