
Le projet de réforme des retraites soulève, entre autres, la question du partage du temps entre travail et loisir. Au confluent de la psychologie et de l’économie, la jeune « science du bonheur » nous donne sur le sujet une matière à réflexion précieuse.
Une récente étude de l’Insee menée à partir des données de l’Eurobaromètre collectées depuis 1975 a observé comment évolue le sentiment de bien-être à mesure que les personnes vieillissent grâce au suivi de générations successives (« Structure du bien-être et satisfaction dans la vie en général », Stéphane Legleye, document de travail n°2022-13, Insee, septembre 2022). C’est entre 60 et 69 ans que culmine le sentiment de bien-être, au-delà même de celui exprimé par les jeunes. Les raisons de ce « pic de bonheur » à un âge qui coïncide plus ou moins avec le départ à la retraite sont multiples, mais elles ont à voir avec le surcroît de temps libre qui marque la fin de la vie professionnelle, alors que l’on est encore, en général, en bonne santé.
Nombre de recherches ont mis en évidence une relation positive entre le sentiment subjectif de bien-être et le temps non contraint dont disposent les personnes, autrement dit, leur temps de loisir. Certaines ont même montré que, dans les sociétés riches, l’effet des loisirs sur le bien-être serait plus marqué que celui du revenu. L’importance de la contribution des loisirs au bien-être vient de ce que, activités menées de manière volontaire, les loisirs ont souvent la faculté de répondre aux besoins psychologiques fondamentaux : l’affiliation (le lien social), le sentiment de maîtrise et d’autonomie, le sens donné à l’existence, ainsi que le détachement et la relaxation.
Ressources temporelles
Les différentes catégories de loisirs n’ont cependant pas le même potentiel. Les activités de loisirs impliquant des relations sociales ont un impact particulièrement élevé. C’est également le cas de l’engagement dans le bénévolat. L’Observatoire des loisirs des Français que l’Observatoire Société & Consommation (ObSoCo) a conduit avec La Compagnie des Alpes a livré une photographie détaillée de l’engagement des Français dans 31 activités de loisirs. 98 % des Français interrogés ont déclaré pratiquer, au moins occasionnellement, l’une au moins de ces activités (en moyenne, ils en pratiquent dix) et 90 % d’entre eux déclarent avoir une « passion » pour au moins une activité.
L’enquête distingue les loisirs actifs et les loisirs passifs. Les premiers sont définis comme les activités qui impliquent la mobilisation de compétences spécifiques et qui débouchent sur la production d’artefacts physiques (le bricolage), d’œuvres (l’écriture) ou de performances (pratique sportive). Les loisirs actifs s’inscrivent ainsi dans le champ du « faire ». Les loisirs passifs regroupent les activités peu exigeantes sur le plan des compétences, qui visent des gratifications immédiates (distraction, amusement, repos…). Ils s’inscrivent dans le champ du divertissement : écouter de la musique, visiter des parcs d’attractions, regarder la télévision…
Il vous reste 50.94% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.