
Au terme d’une dixième journée d’action contre la réforme des retraites, mardi 28 mars, l’intersyndicale a annoncé programmer une nouvelle mobilisation le jeudi 6 avril et a été invitée par la première ministre, Elisabeth Borne, à Matignon en début de semaine prochaine.
Dans la rue, les chiffres de mobilisation des autorités comme des syndicats ont été en replis par rapport au jeudi 23 mars. Le ministère de l’intérieur a recensé 740 000 manifestants dans toute la France, dont 93 000 à Paris, la CGT « plus de 2 millions » dont 450 000 dans la capitale.
Invité de l’émission Quotidien sur TMC, dans la soirée, le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger a évoqué l’invitation de Mme Borne après des semaines d’absence de dialogue entre les deux parties. « On ira. On en a parlé entre nous. Oui, on pense collectivement qu’il faut y aller pour porter nos propositions », a déclaré Laurent Berger.
Le syndicaliste a dit vouloir inclure dans cet échange sa proposition de commencer une médiation entre les syndicats et le gouvernement dans le conflit sur les retraites, malgré le fait que cette hypothèse a été balayée par le porte-parole de l’exécutif, Olivier Véran, dans la journée. Interrogé par l’Agence France-Presse, Matignon a confirmé l’invitation mais n’a fait aucun commentaire sur son ordre du jour. « Ce qui est sûr c’est que nous on ira discuter des retraites. Et du travail parce que ça va avec, mais [surtout] des retraites ! » a insisté M. Berger. Le Conseil constitutionnel doit se prononcer sur le projet de loi d’ici à trois semaines.
Mardi, comme la semaine dernière, des heurts entre manifestants et forces de l’ordre ont éclaté dans plusieurs villes alors que les violences autour de la bassine de Sainte-Soline (Deux-Sèvres), durant le week-end, étaient évoquées dans les cortèges. A Paris, où 10 000 contrôles ont eu lieu autour du cortège, un commerce Leclerc a été pillé et plusieurs feux de poubelles allumés avant des affrontements à l’arrivée place de la Nation. La préfecture de police a fait état, vers 20 h 30, de 55 interpellations.
Tensions aussi à Dijon, Lyon, Lille et Toulouse, où les forces de l’ordre ont fait usage de canons à eau. Nantes, Bordeaux, Strasbourg, Besançon et Nancy ont aussi connu des échauffourées. Redoutant ces incidents, le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin avait déployé un « dispositif de sécurité inédit » : 13 000 policiers et gendarmes, dont 5 500 dans la capitale. « La France ne se mène pas à coups de trique », a répliqué l’insoumis Jean-Luc Mélenchon, appelant ses troupes au « sang-froid ».
Sur le terrain, l’opposition à la réforme reste vive. La circulation des trains était perturbée, avec trois TGV sur cinq et un TER sur deux en moyenne selon la SNCF. A Paris, Lorient et Marseille, des manifestants ont envahi les voies ferrées. La Tour Eiffel était aussi fermée, comme l’Arc de Triomphe ou le château de Versailles.
En revanche, chez les éboueurs parisiens, la CGT a annoncé la suspension de la grève et du blocage des incinérateurs à partir de mercredi, alors que 6 600 tonnes de déchets jonchent encore les rues de la capitale. Si les enseignants étaient moins mobilisés (8 % de grévistes selon le ministère), des dizaines de blocages d’universités, de lycées et même de collèges ont été recensés, d’Avignon au Havre, de Lille à Bordeaux. La mobilisation des jeunes, surveillée comme le lait sur le feu par les autorités, a elle aussi marqué le pas : ils étaient 400 000 dans la rue selon les affirmations de l’Unef, contre 500 000 le 23 mars.