
Dans les bureaux du porte-parole du Kouomintang à Taipei, le mur de la salle de réunion est peint comme une affiche de la campagne pour l’élection présidentielle de janvier. Ce scrutin s’annonce, plus que jamais, placé sous l’égide de la relation compliquée entre Taïwan et la Chine. Sur un ciel bleu irradié par un soleil blanc à douze rayons, un slogan promet aux Taïwanais un avenir radieux : « Pour la paix, pour la stabilité, pour vous ». La fresque est entourée de grands drapeaux. Ceux du vieux parti nationaliste chinois, le Kouomintang, soleil blanc sur fond bleu, créé en 1894 par Sun Yat-sen à Hawaï, ainsi que ceux de la République de Chine, fondée en 1912 à la suite de la chute de l’empire mandchou et dont Taïwan porte encore officiellement le nom et les symboles, au grand dam d’une partie croissante de la population, qui aimerait s’émanciper de ce passé et pouvoir s’appeler tout simplement Taïwan. « Sur une échelle de 1 à 10, le risque de guerre dans le détroit de Taïwan est de 0 en 2023. Si le Parti démocrate progressiste [DPP, parti de la présidente Tsai Ing-wen] reste au pouvoir, le risque passe à 3, voire à 5. Mais si le Kouomintang est élu, il reste à 0 », affirme au Monde le stratège politique du Kouomintang, le professeur Alexander Chieh-cheng Huang, spécialiste des questions de défense.
C’est donc autour d’un message de paix avec la Chine, simple et crucial pour la population de l’île de 24 millions d’habitants, que le Kouomintang (KMT) espère regagner le pouvoir, à l’occasion de la prochaine présidentielle prévue le 13 janvier 2024. Mi-mai, l’état-major du parti a annoncé avoir choisi l’ex-policier Hou You-yi, 65 ans, actuel maire de New Taipei City – l’immense municipalité qui encercle la municipalité de Taipei, la capitale – pour représenter le camp bleu « couleur du KMT ».
Hou aura à affronter, dans le camp rival, le camp « vert », l’actuel vice-président de Taïwan, Lai Ching-te, 63 ans, médecin, maire de la ville de Tainan et président du DPP, le parti progressiste indépendantiste, au pouvoir depuis huit ans et dont l’actuelle présidente, Tsai Ing-wen, ne peut briguer un troisième mandat. L’ancien maire de Taipei, Ko Wen-je, 63 ans, qui a fondé son propre parti, le Parti du peuple de Taïwan, fait également partie des favoris. Le choix de Hou You-yi comme candidat du KMT a par ailleurs éliminé de la course électorale Terry Gou, le fondateur du gigantesque groupe industriel taïwanais Foxconn (qui assemble les iPhone d’Apple en Chine). Le milliardaire avait espéré être adoubé par le camp « bleu » et s’était même déjà spontanément lancé en campagne, le temps de faire un certain nombre de gaffes et de constater sa faible popularité.
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