
« Cette année, on entend des histoires de fous ! »
Une alerte qui faisait suite à l’énorme échauffourée survenue à la 71eminute du match U14 Linars/Nersac/Fléac – Saint-Yrieix, trois jours plus tôt. Le père d’un joueur arédien s’en serait pris à un éducateur…
« Cette année, on entend des histoires de fous ! »
Une alerte qui faisait suite à l’énorme échauffourée survenue à la 71e minute du match U14 Linars/Nersac/Fléac – Saint-Yrieix, trois jours plus tôt. Le père d’un joueur arédien s’en serait pris à un éducateur âgé de 18 ans et à des supporters locaux, avant que la situation ne dégénère. La rencontre a été interrompue et les gendarmes ont même dû intervenir.
Des faits qui peuvent surprendre, surtout chez les jeunes. Et pourtant, ces catégories d’âges sont bien les plus touchées.
« Ces incivilités y montent en flèche depuis la sortie du Covid, en 2021 », constate, à l’instar de nombreux autres éducateurs, Jérôme Dubarry, responsable des jeunes de la JA Bel-Air.
« Cette année, on entend des histoires de fous !, hallucine Mohamed Acherki, entraîneur de Chasseneuil (D2). Entre Saint-Yrieix et Champniers, ça a été tellement chaud que le district a dû prévoir des délégués pour le retour. On parle d’un match de U13 ! »
Comme à Fléac, ces débordements sont le plus souvent provoqués par les… parents.
Jérôme Dubarry souffle : « Certains passent même au-dessus des mains courantes pour se mettre à côté des entraîneurs et gueuler sur les gamins, l’arbitre… »
« Les petits sont perdus entre les consignes des deux, s’agace Yadaly Sakho, entraîneur de l’AS Bel-Air (D2) et directeur du centre de loisirs du centre animation jeunesse (Caj) Bel Air-Grand Font. Leurs proches donnent le mauvais exemple et gâchent le travail des éducateurs. »
Sur le terrain, Gilles Rouffignat partage le constat général : « Pour les parents, on a l’impression qu’il n’y a que des Mbappé dans les équipes de jeunes, qu’ils jouent tous pour devenir champions du monde des U11 de Charente… Quand on regarde le nombre de pros qui sortent des rangs charentais, ils ne sont pas légion. Il faut savoir raison garder. »
Bientôt des responsables de terrain ?
« Les parents regardent de plus en plus leurs enfants comme des produits », s’inquiète un éducateur d’un club de l’agglo angoumoisine qui a souhaité garder l’anonymat.
Face à ces comportements, le président de Saint-Yrieix, Éric Thouraud, se pose même la question de « faire jouer les jeunes à huis clos ».
Pour éviter d’en arriver à de telles extrémités, le patron du handball charentais René Botteleau, qui voit aussi dans sa discipline « de plus en plus d’adultes s’en prendre aux arbitres lors de matches de jeunes », a peut-être une solution à proposer : « Après le passage d’un club en commission de discipline, on a placé des bénévoles dans les tribunes de son enceinte à titre expérimental. Ce, même si la fédération impose déjà depuis de nombreuses années aux équipes receveuses d’avoir un responsable de salle, qui est un licencié bénévole chargé de veiller au bon respect des règles par les spectateurs. »
« C’est une bonne idée », estiment Jérôme Dubarry et Mohamed Acherki.
Le club de ce dernier dispose d’ailleurs d’un bénévole chargé de ce rôle : « Le vice-président de Chasseneuil Christophe Clozier, qui est aussi arbitre et policier municipal de la commune, le fait de lui-même. En plein match, dès que le ton monte derrière les mains courantes, il vient calmer le jeu. »
Pour lui, chaque association devrait s’inspirer de cette initiative. « On peut tous prévoir ce genre de dispositif pour nos matches tendus, d’autant qu’on les identifie pour la plupart dès la sortie du calendrier… Ça rassurerait tout le monde. »
« On a copié-collé une partie du programme du District de Haute-Garonne ‘Touche pas à mon foot’, en installant ce genre de référents sur les plateaux de débutants, pointe Gilles Rouffignat. Nos collègues haut-garonnais les mettent aussi à disposition sur leurs matches de U13, U15 et U17. Il faut s’inspirer de ce qui se fait dans les autres districts et les autres sports. »
Il n’y a plus qu’à !
Les arbitres inquiets
Pour les arbitres charentais, aussi, la situation devient invivable. « Depuis deux ans, c’est de pire en pire au niveau des violences verbales et physiques dont on est victime », alertent, à l’instar de leurs collègues, Mickaël Souverain et Laurent Guiraud, qui officient au niveau départemental. Le premier cité précise : « Ça vient souvent des dirigeants et des spectateurs, notamment des parents sur les matches de jeunes. Je reste souvent après les rencontres pour discuter avec les joueurs et les dirigeants pour essayer de comprendre. On ne trouve pas d’explication, c’est juste de la méchanceté gratuite et on est leurs boucs émissaires. »
Les deux hommes au sifflet craignent que les jeunes arbitres « arrêtent par dégoût » et que ceux qui auraient pu être tentés par la fonction n’osent plus se lancer « par peur » de se retrouver dans des situations similaires.
Afin de garantir un meilleur respect des arbitres, pourquoi ne pas imiter le rugby ? « Les débordements, chez nous, c’est très, très rare », indique, comme beaucoup d’éducateurs de son sport, Florian Millac, responsable des -15, -16 et -18 ans du SA XV. « L’apprentissage des règles et les initiations à l’arbitrage sont obligatoires pour les petits, on doit avoir un minimum de joueurs-arbitres à l’école de rugby… C’est pour ça qu’il y a beaucoup plus de respect envers le corps arbitral. »
Gilles Rouffignat valide : « C’est une bonne idée. Rien n’empêche les clubs de le faire, mais on pourrait aussi le prendre à notre compte. Il faudrait proposer la même chose aux dirigeants et aux supporters, dont les parents. » « Pour les clubs qui ont besoin qu’on forme leurs arbitres, on pourrait leur envoyer des vidéos et même les recevoir », propose Laurent Guiraud.