
Les autorités françaises viennent d’indiquer que Narendra Modi, le premier ministre de l’Inde, sera l’invité d’honneur des festivités du 14-Juillet. Cette visite intervient au moment où l’Inde évolue vers un type de régime que l’on peut qualifier d’autoritarisme électoral. Si les Indiens sont appelés aux urnes à intervalles réguliers, la compétition entre les partis en présence, à l’occasion des législatives, n’est plus guère équitable.
Le Bharatiya Janata Party (BJP), ou Parti du peuple indien, de Narendra Modi, bénéficie non seulement d’une couverture médiatique inouïe lors des campagnes électorales, mais aussi de financements qui battent tous les records : on évalue à plus de 3 milliards d’euros le budget de la campagne 2019 du BJP, un argent qui lui a permis de saturer l’espace public à travers la télévision et des médias sociaux experts en désinformation. Ces dépenses ont été permises par la mise en place de nouvelles règles de financement de la vie politique rendant très opaques les dons des particuliers et des entreprises.
Surtout, entre les élections, la démocratie indienne est littéralement mise entre parenthèses. Le Parlement n’est plus qu’une vulgaire chambre d’enregistrement ; les magistrats se résignent à ne proposer à la nomination à la Cour suprême que des juges ayant l’heur de ne pas déplaire au gouvernement, qui, sinon, ne valide pas leur désignation ; la commission électorale, qui organise les scrutins, module ses décisions en fonction des attentes du pouvoir ; les instances de lutte anticorruption, comme celle qui est chargée d’appliquer le droit à l’information, ne sont plus dirigées que par des compagnons de route du BJP – une règle qui s’applique aussi au Central Bureau of Investigation (la version indienne du FBI).
Les opposants sont victimes d’intimidation ou de répression. Des journalistes sont pourchassés, des organisations non gouvernementales privées de financements extérieurs, des intellectuels soumis à une surveillance d’Etat et des hommes politiques arrêtés sous prétexte de fraudes fiscales. Rahul Gandhi, le leader du Parti du Congrès, a même été condamné à deux ans de prison pour avoir diffamé Narendra Modi, ce qui l’a obligé à quitter son siège à l’Assemblée nationale – où il dénonçait la collusion entre M. Modi et les oligarques indiens, Gautam Adani en particulier.
Milices nationalistes
Outre ces atteintes à l’Etat de droit, l’Inde bascule dans la xénophobie, les minorités musulmane et chrétienne étant progressivement réduites à un statut de citoyens de seconde zone, comme en témoignent les discriminations dont les premiers sont victimes sur les marchés du travail et du logement. Surtout, ces minorités sont la cible de violences, les milices nationalistes hindoues liées au parti au pouvoir cherchant à imposer dans la rue une véritable police culturelle des plus musclées.
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