Médiathèque fermée, journaliste agressé : le quartier de Pissevin, à Nîmes, otage du trafic de drogue

Sur la place Claude-Debussy du quartier Pissevin, à Nîmes, la tension est toujours palpable mardi 6 juin. Des guetteurs au service du trafic de drogue sont en poste et ne se cachent pas pour surveiller les déplacements de la population. Les quelques habitants croisés refusent de répondre aux questions. Idem pour les commerçants. Le jour même, un journaliste du groupe M6 a été violemment agressé alors qu’il réalisait un reportage sur la fermeture de la médiathèque Marc-Bernard. Trois personnes ont depuis été placées en garde à vue, deux mineurs et un majeur, dans le cadre de cette affaire.

Lundi, le maire Jean-Paul Fournier (Les Républicains, LR) a fait savoir, par communiqué, qu’il prenait la décision de fermer « jusqu’à nouvel ordre » cet équipement municipal. L’édile estime que les conditions ne sont plus réunies pour assurer la sécurité du personnel. Depuis plusieurs mois, des trafiquants ont installé aux yeux de tous, autour de la médiathèque, des points de deal. Chariots et cartons servent de « checkpoints pour encadrer leur commerce illicite », explique-t-on à la mairie, où jamais, une décision aussi radicale n’a été prise.

Les problèmes liés au trafic de drogues persistent depuis de nombreuses années sur ce secteur, et dans trois autres quartiers de la préfecture gardoise (Valdegour, Chemin-Bas d’Avignon et Mas de Mingue). Mais cette fois, la municipalité a souhaité créer « un électrochoc » pour reprendre les mots de Pascal Gourdel, adjoint délégué au personnel de la Ville. La Ville accuse l’État de ne pas déployer les moyens suffisants. Depuis 2020, Jean-Paul Fournier épingle régulièrement, dans les médias locaux, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui estime pour sa part que Nîmes bénéficie d’importants moyens. Le ministre a annoncé mardi l’envoi d’une compagnie de CRS.

« Une pression qui va crescendo

Sur place, cette bataille des chiffres agace les habitants. L’agression du journaliste mardi, et la médiatisation nationale qui s’ensuit, suscite une grande vague d’émotion. Une habitante (qui a requis l’anonymat) se dit exaspérée. « C’est vraiment triste. Cette médiathèque, c’est le dernier endroit où les enfants peuvent s’extraire du contexte de ce quartier. Lorsqu’ils sont à l’intérieur, ils sont dans les livres ou font des activités et oublient les tours de béton, l’environnement délabré, la saleté et les dealers », déclare la mère de famille qui s’est installée à Pissevin en 2004, et qui a vu la situation se dégrader depuis 2020. « Depuis le Covid, j’évite de passer par là, les trafiquants sont toujours là, on a peur d’un danger, d’être là au mauvais moment, de prendre une balle…  »

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