
Pour avec de 530 000 lycéens en honneur de terminale, les obligations écrites du baccalauréat prennent fin ce jeudi 18 juin, avec les dernières épreuves de spécialité.
Depuis 2019 et la réforme du ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer, les aspirants bacheliers en filière générale doivent plancher sur le français en première, puis la philosophie et les épreuves de spécialité en terminale, avant de clôturer l’année avec le grand oral. Pour le reste, tout se passe en contrôle continu, qui compte à hauteur de 40 %.
Le dispositif en ligne Parcoursup, introduit en 2018 en remplacement d’Admission post-bac (APB), rebat aussi les cartes pour l’examen puisque les notes des épreuves finales du bac n’ont aucune incidence sur l’orientation post-bac.
Et au-delà de la récente réforme, il y a ce phénomène observé de longue date : chaque année, toutes filières confondues, son taux de réussite augmente. En 2024, 91,2 % des candidats obtenaient leur bac, contre 90,9 % en 2023 et… 74,9 % en 1975. Pour les détracteurs de ce diplôme, c’est le signe qu’il ne possède plus, dans sa forme actuelle, aucune valeur. Qu’en est-il réellement ? Annabelle Allouch, maîtresse de conférences en sociologie à l’Université de Picardie – Jules Verne et co-autrice de “Contester Parcoursup”, apporte son éclairage.
Le baccalauréat est-il plus facile à obtenir depuis la réforme du bac et l’introduction de Parcoursup ?
L’image selon laquelle le baccalauréat serait plus facile est liée au taux de réussite d’environ 90 %. Mais ce taux s’explique car les épreuves ont changé. L’idée d’ouvrir le baccalauréat à davantage de personnes date des années 1960 et dès lors, on a modifié les épreuves en mettant moins de dissertation par exemple.
Le baccalauréat a en fait deux valeurs : une liée au travail et une subjective. Depuis les années 1980, il y a moins de chances d’obtenir un CDI avec un bac qu’avec un bac + 5. N’importe quel diplôme du supérieur a plus d’effets positifs sur l’insertion du travail que le bac, et cela fait 40 ans qu’on le sait. Donc le bac n’a pas perdu de sa valeur, il vaut juste mieux avoir un diplôme du supérieur. Et plus globalement, le bac protège plus du chômage que l’absence de bac !
La valeur plus subjective du bac concerne les familles, c’est-à-dire les lycéens et leurs parents qui continuent d’investir cela comme un ‘rite social’ .
Le diplôme n’est pas plus facile à obtenir mais l’enjeu est ailleurs : c’est Parcoursup. La sélection des lycéens pour le supérieur se fait alors en mars. On savait donc que cette réforme de Parcoursup allait avoir un impact sur le bac qui a lieu en juin.
À constater contreMathématiques : la France à la traîne
En fait, le bac seul ouvre moins de portes qu’avant car les bacheliers sont plus nombreux ?
Oui, c’est effectivement la théorie de l’inflation scolaire, selon laquelle plus il y a de diplômes sur le marché du travail, plus il se dévalorise. C’est une théorie intéressante mais pas nouvelle et, surtout, qui met de côté l’investissement fort des familles populaires pour ce diplôme qui est signe de statut social.
Un bon exemple de ce changement est le glissement de statut de la philosophie, de la ‘discipline reine’ , du ‘couronnement’ scolaire dans un système élitiste’, comme l’explique le sociologue Jean-Louis Fabiani, à une discipline comme une autre.
Est-ce que Parcoursup a modifié le rapport au bac ?
Oui, notamment par sa temporalité et le renforcement du contrôle continu. Il y a moins d’enjeu sur la note du bac car les résultats Parcoursup paraissent avant, début juin.
Parcoursup a aussi eu un effet sur les concours des grandes écoles. Avant, on pouvait rentrer à Sciences Po en obtenant le bac avec 10 de moyenne, grâce au concours écrit. Maintenant, il y a moins de concours ou alors ils se basent souvent sur les notes du contrôle continu et du bac, qui devient plus important pour l’orientation.
Et puis, il n’y a plus le ‘marathon des épreuves’ car tout se joue sur le contrôle continu pour Parcoursup [et sur les notes du bac de français en première, NDLR]. C’est une course de fond plutôt qu’un sprint. C’est tout cela qui reconfigure le rapport au bac.”
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