Le monde du travail semble découvrir le sexisme ordinaire. « T’es enceinte ? ENCORE ?? », « T’es passée sous le bureau pour avoir le poste ? » Ces deux SMS reçus par des salariées et recueillis par l’avocate Elise Fabing en disent long sur l’ampleur du problème de harcèlement auquel les employeurs doivent faire face.
Les entreprises partent de loin. « On a beaucoup de boulot », constate Yann Illiaquer, responsable diversité et référent harcèlement d’EDF. « Le groupe ressemble à la société française avec sa culture un peu machiste. Je me félicite de l’augmentation des dossiers de signalement, ça signifie qu’on en met de moins en moins sous le tapis », poursuit M. Illiaquer, présent au colloque organisé le 28 septembre par le cabinet Technologia pour faire le bilan du rôle de « référent harcèlement », une nouvelle fonction créée en 2018 pour « lutter contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes au travail ».
La prise de conscience des employeurs est relativement récente. Moins de dix ans. Elle a été déclenchée par l’entrée dans le code du travail, en 2015, du concept d’« agissements sexistes », « ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».
Deux ans plus tard, en 2017, #metoo a commencé à libérer la parole des salariés, tout doucement. Car « à la différence du harcèlement moral, la parole de la victime [d’agissements sexistes ou de harcèlement sexuel] est plus difficile à recueillir. C’est souvent la rumeur qui parvient d’abord aux DRH », souligne Me David Guillouet, du cabinet d’avocats MGG Voltaire. Mais l’enjeu a pris de l’ampleur cette année, avec l’entrée en vigueur, en mars, d’une nouvelle loi qui permet de qualifier les comportements sexistes de harcèlement sexuel.
« Petit à petit, ça évolue »
Mais c’est surtout depuis quatre ans que les entreprises ont commencé à bouger. Pas toujours aisément. Les grandes organisations ont souvent un ou des référents harcèlement rattachés à la direction et d’autres au comité social et économique (CSE). Ces référents employeur, d’une part, et référents CSE, d’autre part, réagissent aux alertes des salariés ou des élus, parfois ensemble, souvent en parallèle. « Depuis quatre ans que je suis référent harcèlement, la référente employeur, je ne l’ai pas vue », déplore Ahmed Berrahal, le référent harcèlement CGT-RATP, réintégré à l’entreprise sur décision de justice après avoir été licencié alors qu’il défendait une victime d’agression sexuelle.
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