Cuba : la délivrance totale de visas américains d’immigration reprend à l’ambassade de la Havane

Frappée par une grave crise économique, Cuba connaît un exode migratoire sans précédent. C’est dans ce contexte que l’ambassade américaine à La Havane reprend, mercredi 4 janvier, la délivrance totale de visas pour les Cubains désirant s’installer aux Etats-Unis.

« Les Etats-Unis s’efforcent d’assurer une émigration sûre, légale et ordonnée pour les Cubains en étendant ses services consulaires à La Havane et en reprenant [les procédures] de regroupement familial », a fait savoir vendredi la représentation diplomatique américaine, dans un communiqué confirmant la reprise au 4 janvier.

L’ambassade avait annoncé en mars la réouverture de son consulat, fermé depuis 2017 en raison de supposés incidents de santé ayant touché des diplomates. Plusieurs rencontres de haut niveau sur la question migratoire s’en sont suivies, d’abord à Washington puis à La Havane, avec l’objectif de réactiver les accords migratoires entre les deux pays interrompus sous le gouvernement de Donald Trump (2017-2021).

Course d’obstacles

En mai, le consulat a ainsi repris de façon « limitée » la délivrance de visas pour les Cubains souhaitant émigrer, puis l’ambassade a annoncé une reprise totale des procédures, sauf visa de tourisme, pour janvier 2023.

« Nous avons fait des avancées très discrètes visant à mettre la coopération bilatérale sur la voie de l’exécution des accords migratoires », a reconnu mi-décembre le président cubain Miguel Diaz-Canel.

Depuis 2017, les Cubains désirant obtenir un visa pour les Etats-Unis étaient confrontés à une véritable course d’obstacles, avec l’obligation de faire leur demande, à leurs frais, dans un pays tiers – en général le Guyana, en Amérique du Sud.

Nombre de Cubains profitent depuis fin 2021 de l’exemption de visa au Nicaragua, un allié de La Havane, pour tenter ensuite de rallier les Etats-Unis à travers l’Amérique centrale. Quelque 326 336 Cubains, soit 2,9 % de la population de l’île (11,2 millions d’habitants), sont ainsi entrés illégalement aux Etats-Unis sur douze mois (jusqu’à début décembre 2022), selon les autorités américaines. L’émigration illégale par la mer a aussi grimpé en flèche ces derniers mois.

Le discours de Biden s’est durci

Le gouvernement cubain a reconnu que Washington avait accordé en 2022, pour la première fois depuis 2017, plus de 20 000 visas à des Cubains souhaitant s’établir aux Etats-Unis, comme prévu par des accords datant de 1994. Mais, même si Washington « ne veut pas le reconnaître, il y a un lien direct entre la recrudescence des mesures extrêmes contre l’économie cubaine et le flux migratoire dramatique qui a explosé », insistait en novembre auprès de l’Agence France-Presse Johana Tablada, haute-fonctionnaire du ministère des affaires étrangères.

Si certaines sanctions prises sous le mandat de Donald Trump ont été assouplies par son successeur Joe Biden, le démocrate se garde bien pour l’instant de reprendre à son compte la politique de rapprochement initiée par Barack Obama (2009-2017). A son arrivée à la Maison Blanche en 2021, M. Biden avait promis de revoir la politique américaine en direction de Cuba, mais son discours s’est durci à la suite des manifestations anti-gouvernementales sur l’île en juillet 2021.

En décembre, le président américain a appelé une nouvelle fois à la libération de « centaines de prisonniers politiques » arrêtés lors des manifestations. Washington a également maintenu Cuba sur la liste des pays soutenant le terrorisme et l’a inclus récemment dans une autre liste de pays attentant à la liberté religieuse. La normalisation des relations entre les deux pays n’est donc pas à l’ordre du jour.

Le Monde avec AFP

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