Alors que l’Italie et la France s’affronteront dimanche à Rome et dans quelques mois lors du Mondial, l’occasion était rêvée de réunir les deux anciens Grenoblois, qui ont percé en Pro D2 avant de rejoindre Toulouse. Ils évoquent leur rencontre, leur trajectoire similaire… Interview croisée.
Quand vous êtes-vous rencontrés pour la première fois ?
Vincent Clerc : C’était il y a deux ans et demi. Nous nous étions eus au téléphone avant en nous disant qu’à l’occasion, il faudrait que l’on se voie. Il était blessé, Grenoble allait jouer à Colomiers et il a profité du déplacement pour venir à la maison boire le café et discuter.
Était-ce par rapport à votre passé grenoblois ?
Ange Capuozzo : Nous avons quelques connaissances communes également. Grenoble n’est pas très grand et pour la petite histoire, j’ai mes grands-parents qui habitaient dans l’immeuble en face des siens. Il y a un concours de circonstances qui fait que pour moi, c’était enrichissant de pouvoir échanger avec Vincent sur le sport pro que je découvrais et sur la façon d’appréhender ce monde-là.
V. C. : Il était en train d’exploser donc l’idée était un peu d’échanger de manière purement informelle sur la façon de se structurer, quelles étaient les bonnes décisions à prendre ou pas de mon point de vue.
Quelle vision aviez-vous l’un de l’autre ?
V. C. : Je suis très attaché à Grenoble, je regarde beaucoup de matchs. J’ai toujours trouvé que le club avait réussi et s’était reconstruit dans les moments difficiles en faisant éclore des jeunes. Du coup, j’ai naturellement suivi Ange pour plein de raisons. Parce que c’est Grenoble, qu’il est hyper agréable à voir jouer et qu’il faisait briller le club.
A. C. : C’est le moment où je vais le flatter (rires). À Grenoble, nous avons un très, très grand souvenir de Vincent. Il a fait un an en Pro D2, les gens le savent mais ils sont fiers de dire qu’il a été formé à Grenoble et de la trace qu’il a laissée dans le rugby français, que ce soit avec Toulouse ou l’équipe de France. Des fois, certains mentent un peu en disant qu’il y est resté longtemps (rires). L’autre aspect, encore plus important, c’est que je n’avais eu que des compliments concernant l’homme qu’il était et cela m’était un peu plus facile de lui faire confiance. Je savais que ce serait constructif et sain. C’est une fierté de dire que je peux le côtoyer un petit peu.
Et depuis que vous vous connaissez ?
V. C. : J’adore l’homme qu’il est. Autrement, nous ne nous serions pas rappelés ni revus. J’aime beaucoup l’humilité et l’approche qu’il a eues. Quand on a les mêmes valeurs, que l’on ressent les mêmes choses, que l’on a la même hargne sur le terrain, les choses se font naturellement. Je trouve que nous avons pas mal de points communs. Nous nous ressemblons beaucoup dans nos parcours, notre vision du sport, ce que nous voulons faire de notre carrière.
« Voir un mec mettre un carreau à un joueur alors qu’il lui rend 30 kg, quand on est un peu moins gaillard et qu’on a 12, 13 ans, je pense que c’est très inspirant. »
L’arrivée d’Ange vous rappelle celle d’un petit ailier casqué il y a 20 ans ?
V. C. : C’est un copier-coller en fait. Nous avons fait des choix qui ne sont pas évidents car c’est toujours dur de se déraciner, de prendre le risque d’aller dans un club où il y a de la concurrence. Nous nous sommes tous les deux servis de la Pro D2 pour exploser et d’un coup, nous avons basculé dans le grand bain. Ange, cela s’est fait de suite au niveau international. Moi, j’ai ma première sélection en novembre après mes premiers matchs fin août. Tu passes d’un niveau Pro D2 à un niveau Top 14, Coupe d’Europe puis international sans savoir si tu as vraiment le niveau. Ce ne sont que des défis permanents en fait. C’est assez grisant car il y a pas mal d’insouciance au début. Et Ange valide toutes les étapes. À chaque fois qu’il a l’opportunité, il montre qu’il n’est pas là par hasard.
Ange, vous n’êtes pas trop fan de la comparaison mais comprenez-vous que vos trajectoires puissent être comparées ?
Ce n’est pas une question d’être fan. J’ai 7 matchs en Top 14, 7 sélections et je ne peux pas me comparer. J’ai validé certaines étapes mais le plus dur reste à venir. De me comparer à une référence de notre sport en termes de statistiques et de performances, pour l’instant j’en suis loin même si je comprends les similitudes d’origines et de trajectoire. Je rentre dans une phase où cela va être encore plus compliqué que ce que j’ai fait. J’ai eu l’insouciance mais maintenant, il va falloir assumer. Alors ce sont des très bons problèmes mais je ne suis pas encore dans cette phase où je peux me comparer à qui que ce soit.
Le parcours de Vincent vous inspire-t-il ?
Il m’inspire pour une raison assez simple : c’est la persévérance et le travail qu’il faut fournir face à des étapes qui sont dures à franchir, où on a l’impression qu’on ne va pas pouvoir le faire. C’est très inspirant aussi parce que Vincent représentait cet ailier qui était travailleur, talentueux et qui pouvait prouver aussi qu’il y avait de la place pour les petits gabarits. Parce qu’on était quand même dans une période où il y avait des ailiers très, très costauds. J’ai souvenir de plaquages sur des mecs deux fois plus grands. Ce genre d’images, quand tu es gosse, cela a de l’importance. Voir un mec mettre un carreau à un joueur en face alors qu’il lui rend 30 kg, quand on est un peu moins gaillard et qu’on a 12, 13 ans, je pense que c’est très inspirant.