La ville américaine de Memphis (Tennessee) se préparait, vendredi 27 janvier, à des manifestations en réaction à la publication, prévue en fin de la journée (dans la nuit à Paris), d’une vidéo montrant l’arrestation brutale par cinq policiers d’un Afro-Américain, mort trois jours après avoir été passé à tabac par des policiers.
« Quand mon mari et moi sommes arrivés à l’hôpital et que j’ai vu mon fils, il était déjà mort. Ils l’avaient réduit en bouillie. Il avait des bleus partout, sa tête était enflée comme une pastèque », a raconté en larmes RowVaughn Wells, la mère de Tyre Nichols, dans une interview diffusée vendredi par la chaîne CNN.
La cheffe de la police de Memphis, Cerelyn Davis, a prévenu que la vidéo montrant l’interpellation de cet homme de 29 ans était « comparable, voire pire » à celle montrant l’arrestation violente de Rodney King en 1991. L’acquittement, un an plus tard, des quatre policiers impliqués déclencha des émeutes sans précédent à Los Angeles.
« Nous prévoyons de partager la vidéo via un lien YouTube pour qu’elle soit accessible à tous. Ce sera fait en fin d’après-midi », a déclaré Mme Davis sur CNN. Elle a ajouté que les images des cinq policiers, eux-mêmes afro-américains, illustraient une « sorte d’effet de groupe ». « La vidéo est divisée en quatre séquences (…) : le contrôle [routier] initial, celui à proximité de la maison de Tyre et la caméra portative de plusieurs personnes », a-t-elle précisé.
« C’est absolument épouvantable »
Le 7 janvier, des policiers avaient voulu contrôler Tyre Nichols pour une infraction routière. Une « altercation avait eu lieu » avec les agents et « le suspect s’était enfui », selon les policiers. Rattrapé, Tyre Nichols avait été interpellé dans des circonstances que les autorités ont pour l’instant évité de décrire précisément. Le déroulé précis des faits et leur durée restent source de questions, tout comme le temps écoulé avant que la victime ne bénéficie de soins médicaux. Tyre Nichols s’était plaint d’avoir du mal à respirer et avait été hospitalisé. Il est mort trois jours plus tard.
Les cinq policiers ont été inculpés pour meurtre, coups et blessures et écroués. Quatre d’entre eux ont ensuite été libérés sous caution. Ce qui s’est passé est « inadmissible » et « criminel », cela « n’aurait pas dû se produire », a déclaré David Rausch, directeur du bureau d’enquête du Tennessee, qui s’est dit « choqué » et « écœuré » par ce qu’il a vu. « En un mot, c’est absolument épouvantable », a-t-il dit.
Cette affaire trouve un écho particulier dans le pays, encore marqué par la mort de George Floyd, en mai 2020, et les manifestations contre le racisme et les violences policières, aux cris de « Black lives matter » (« les vies noires comptent ») qui s’étaient ensuivies. Le drame a relancé le débat sur la violence policière dans le pays.
Le président des Etats-Unis, Joe Biden, a réclamé dans un communiqué une « enquête rapide, complète et transparente » sur ce drame et appelé à ce que les manifestations soient « pacifiques ». « Nous ne pouvons ignorer le fait que les interventions policières mortelles ont davantage touché les personnes noires », a-t-il rappelé.
Le président démocrate exhorte le Congrès à voter pour un projet de loi de réforme de la police, adopté à la Chambre des représentants en 2020 mais qui n’a pas passé l’obstacle du Sénat. Depuis le meurtre de George Floyd, le Congrès a été incapable d’adopter la moindre réforme ambitieuse de la police, ne serait-ce que celle visant à interdire les clés d’étranglement.