A l’approche des prochaines manifestations contre la réforme des retraites, programmées mardi 7 et samedi 11 février, Laurent Escure « touche du bois ». Le secrétaire général de l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA), qui compte une importante section dans la police, n’espère pas seulement prolonger l’affluence des premières mobilisations contre le projet du gouvernement, il veut que le « changement de doctrine policière », observé les 19 et 31 janvier, s’ancre définitivement dans les rues parisiennes.
Comme l’ensemble des responsables syndicaux interrogés, Laurent Escure décrit une « vraie différence » en matière de maintien de l’ordre à l’occasion des deux premières grandes manifestations surveillées par Laurent Nunez, nommé préfet de police de Paris en juillet 2022. Une rupture avec la « méthode Didier Lallement », son prédécesseur, visible avant même les défilés. « Les liens étaient devenus quasiment inexistants avec la préfecture, souffle Patricia Drevon, secrétaire confédérale de Force ouvrière (FO). Avec [Laurent] Nunez, les réunions de préparation ont fait leur retour pour discuter du parcours. On est clairement passé d’une gestion autoritaire de la sécurité à une recherche plus forte de consensus avec les syndicats. »
Un « retour vers une méthode traditionnelle » confirmé sur les pavés. Les représentants des travailleurs saluent une présence policière plus discrète, concentrée dans des rues adjacentes, et surtout moins offensive. « Les interpellations sont plus ciblées et rapides, les interventions moins brutales et impactantes, observe Frédéric Bodin, secrétaire national de Solidaires. Nous ne sommes pas pour autant revenus à l’époque où le cortège était un lieu sacré : des manœuvres ont encore tamponné un peu nos militants. »
Meilleure « cogestion »
La Préfecture de police se défend de toute révolution, se réfugiant derrière la « stricte application » du nouveau schéma national du maintien de l’ordre, mais reconnaît vouloir invisibiliser les forces de l’ordre, et les réserver à des « actions rapides » en cas de dégradations de bâtiments ou de sérieuses échauffourées. « La coopération avec les syndicats est donc utile opérationnellement et responsabilisante, résume un haut gradé. L’idée est aussi de partager le fardeau [de la sécurisation] pour que le gouvernement ne soit pas accusé de faire déraper la manifestation. »
Les prémices d’une meilleure « cogestion » de l’événement entre organisateurs et préfecture remettent au cœur du dispositif les services d’ordre syndicaux (ou « SO »). Constituées au sein de chaque centrale et composées de dizaines de militants, identifiables ou non, ces équipes sont chargées d’assurer la protection des manifestants. Depuis plusieurs mois, ces bénévoles constatent le retour à leurs côtés des officiers de liaison avec la salle de commandement de la préfecture. Des relais qui permettent d’adapter, si besoin est, le rythme de la déambulation à la présence de perturbateurs à l’avant des manifestations.
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