Ce que l’on sait sur Andreï Medvedev, le déserteur russe de Wagner qui a fui en Norvège

Il n’est pas le premier combattant russe à déserter, mais il est le premier issu des rangs de Wagner, le groupe de mercenaires russe qui mène l’offensive dans le Donbass. Andreï Medvedev, 26 ans, se présente comme l’ancien chef de la 1re section du 4e peloton du 7e détachement d’assaut de Wagner et affirme avoir combattu en Ukraine. Il est entré illégalement en Norvège dans la nuit du jeudi 12 au vendredi 13 janvier pour y demander l’asile.

M. Medvedev est un ancien soldat de l’armée russe, qui a purgé une peine de prison entre 2017 et 2018. Selon l’ONG Gulagu, qui affirme l’avoir aidé à fuir son pays, il a rejoint Wagner le 6 juillet 2022, avec un contrat de quatre mois, lors desquels il a mené au combat une dizaine d’hommes. Mais à l’issue de cette période, il aurait appris que le groupe avait l’intention de prolonger son engagement indéfiniment. Le jeune homme aurait alors fait le choix de déserter et se serait caché pendant deux mois en Russie.

Dans un entretien avec le journal en ligne indépendant russe The Insider et dans une vidéo publiée sur la chaîne YouTube de Gulagu, Andreï Medvedev explique avoir quitté Wagner après avoir assisté aux meurtres de « refuzniks », ces recrues qui ont refusé de se battre contre les Ukrainiens ou qui ont voulu déserter. Il y évoque ainsi le rôle d’une unité spéciale, qui exécute à la fois des Ukrainiens et les mercenaires errants.

Ce n’est pas la première fois qu’il alerte sur les exactions commises par cette société militaire privée aux méthodes brutales. En décembre 2022, par l’intermédiaire de Gulagu, il interpellait déjà les autorités russes sur ces exécutions extrajudiciaires et demandait l’intervention du FSB – les services de renseignements du pays – et du président Vladimir Poutine.

Fuite rocambolesque

Sa fuite de Russie, telle qu’il l’a racontée dans la vidéo publiée par Gulagu, a tout du film d’espionnage, époque guerre froide. En tenue de camouflage blanc, il part de Nikel, une commune urbaine de l’oblast de Mourmansk (nord-ouest), mais les gardes-frontières le repèrent alors qu’il s’apprête à traverser la Pasvik, une rivière qui sépare la Russie de la Norvège :

« J’ai entendu des aboiements de chien, je me suis retourné, j’ai vu des gens avec des lampes torches, à environ 150 mètres, qui couraient dans ma direction. J’ai entendu deux tirs, les balles ont sifflé pas très loin. J’ai cassé mon téléphone et je l’ai jeté dans la forêt, puis j’ai couru sur la glace vers la lumière des maisons. Ils ont lâché le chien, mais apparemment il s’est emmêlé quelque part. Ils avaient probablement eux-mêmes peur de courir après moi, la glace était fine. »

Arrivé en Norvège, Andreï Medvedev frappe à la porte d’une demeure, dans les environs de Skroytnes. Il est rapidement arrêté par une patrouille norvégienne et la police, prévenues par la Russie.

Brynjulf Risnes, l’avocat norvégien du transfuge a déclaré que son client, qui se trouvait désormais dans la « région d’Oslo », avait décidé de quitter Wagner après avoir vécu « des choses complètement différentes de ce qu’il attendait ». « Il dit avoir pris part à des combats (…) et qu’il n’a pas été en contact avec des civils », a expliqué le conseil.

M. Risnes a ajouté que M. Medvedev avait emporté avec lui des preuves de crimes de guerre commis en Ukraine et qu’il avait l’intention de partager ces informations avec des groupes enquêtant sur ces allégations.

Interrogations sur la nationalité du déserteur

Sur Telegram, le groupe Wagner essaie de décrédibiliser l’ancien mercenaire. Répondant à des questions du journal norvégien Aftenposten, il écrit : « Oui, en effet, Andreï Medvedev a combattu dans Nidhögg, le bataillon norvégien de Wagner, car il a la nationalité norvégienne. Mais il aurait dû être poursuivi pour avoir tenté de maltraiter des prisonniers. Des documents détaillés sont disponibles auprès du service de sécurité de Wagner et ils devaient être remis aux autorités russes. Jusqu’à présent, il était sur la liste des personnes recherchées. Faites attention, il est très dangereux. » Sans aborder, les accusations de meurtres et de mauvais traitements à l’encontre de ses propres recrues. Répondant à ces affirmations, M. Risnes a déclaré, mardi, que son client « n’a absolument aucune nationalité norvégienne ni aucun lien antérieur avec la Norvège, pour autant que je sache ».

Début janvier, la société militaire privée avait affirmé sur la même messagerie : « A ce jour, nous avons 67 [combattants] originaires de Norvège. » Des affirmations qui n’ont pu, pour l’heure, être confirmées.

Andreï Medvedev connaît le sort des déserteurs en Russie : « J’étais sous la menace d’être enlevé, d’être assassiné, d’être descendu, voire pire d’être condamné à la masse comme [Evgueni] Noujine. » Le Russe a été le chef d’un ex-détenu et déserteur, dont l’effroyable exécution avait été filmée et rendue publique mi-novembre.

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