Le métavers de Meta, Horizon Worlds, débarque en France précédé par plusieurs polémiques

C’est fait : après plus de six mois d’anticipations, Meta, la maison-mère du groupe Facebook, a lancé son métavers, baptisé Horizon Worlds, en France et en Espagne mardi 16 août. L’annonce a été effectuée par le patron lui-même, Mark Zuckerberg, dans un post sur Facebook. “J’ai hâte de voir les gens explorer et construire des mondes immersifs, et d’apporter cela à plus de pays bientôt“, a écrit le fondateur de l’empire des réseaux sociaux, qui a réalisé un virage stratégique vers le métavers en octobre 2021.

Lancé en décembre dernier aux Etats-Unis et au Canada, puis en juin 2022 au Royaume-Uni, Horizon Worlds est le métavers conçu par Meta : une plateforme dans laquelle les utilisateurs dotés d’un casque de réalité virtuelle Quest –qui domine le marché des casques VR et appartient à Meta– peuvent s’immerger dans un univers virtuel grâce à un avatar. Considéré comme le futur d’Internet dans la Silicon Valley et par les techno-enthousiastes, le métavers est censé créer un véritable monde virtuel immersif, avec sa propre économie -via l’achat de NTF- et de nouveaux usages dans de nombreux secteurs, notamment le divertissement (les mondes virtuels existent déjà dans certains jeux vidéo comme Fortnite ou Roblox, par exemple) mais aussi le e-commerce -avec un avatar qui essaie virtuellement vos tenues-, l’art, l’immobilier ou encore le luxe.

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Un pari risqué et des débuts difficiles

Pour l’heure, Horizon World est encore très loin de réaliser ses promesses : comme le montre la photo publiée par Mark Zuckerberg, la plateforme affiche un design pour le moins rudimentaire, très loin de la fluidité parfaite promise entre le monde réel et le monde virtuel. De plus, la nécessité de posséder un casque de réalité virtuelle représente un frein important. Si les ventes de casques VR ont doublé en 2021 avec 11,2 millions d’exemplaires vendus dans le monde d’après l’institut IDC -dont 78% pour l’Oculus Quest de Meta-, la réalité virtuelle reste chère et est encore loin d’être grand public, ce qui réserve le métavers à une minorité d’équipés en attendant l’arrivée d’une version web disponible sans casque.

De plus, il manque encore l’essentiel : les applications. Meta et les autres plateformes de métavers ont besoin que les développeurs créent des usages qui convaincront les utilisateurs de basculer dans leur monde virtuel. Pour l’instant, la sauce a du mal à prendre : Meta n’a plus communiqué sur l’adoption d’Horizon Worlds depuis février, ce qui est mauvais signe. A l’époque, deux mois après son lancement aux Etats-Unis, il revendiquait 300.000 utilisateurs et 10.000 mondes virtuels.

Le métavers est donc surtout à ce jour un gouffre financier pour Meta. Au deuxième trimestre 2022, sa division Reality Labs a certes réalisé 452 millions de dollars de chiffres d’affaires (+48% par rapport à l’an dernier), mais elle accuse une perte nette massive de 2,8 milliards de dollars. Dans un contexte difficile sur les marchés pour les entreprises tech, Meta a décidé de licencier et a également annoncé augmenter de 33% le prix du Quest 2, son casque phare de réalité virtuelle, qui passe de 299,99 dollars à 399,99 dollars. Une décision qui pourrait ralentir l’adoption de la VR et donc le basculement du public dans le métavers…

D’où l’importance pour Meta d’entretenir la hype et d’ouvrir Horizon Worlds à de plus en plus de marchés. Aux Etats-Unis, où la plateforme est disponible depuis fin 2021, Meta ajoute petit à petit des fonctionnalités qui donnent corps au métavers. En avril, l’entreprise a commencé à tester les ventes d’objets virtuels par des créateurs de contenus aux utilisateurs de Horizon Worlds. En juin, Mark Zuckerberg a annoncé que les avatars pourront bientôt se rendre visite les uns chez les autres dans leur propre maison virtuelle, c’est-à-dire l’univers qu’il a choisi de visualiser quand il met son casque (comme une terrasse à la montagne ou une station spatiale).

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Polémiques et risques assombrissent l’horizon du métavers de Meta

Cerné par les scandales majeurs -Cambridge Analytica en 2017, les Facebook Files en 2021…-, de plus en plus regardé par les régulateurs, Meta n’échappe aux polémiques dans le métavers également. Des utilisateurs se sont déjà plaints de cas de harcèlement sur Horizon Worlds, conduisant Meta à instaurer une distance minimum entre les avatars. Comme sur Facebook, la faible modération de Horizon Worlds est déjà pointée du doigt : une chercheuse a même déclaré avoir été violée, via son avatar, sur la plateforme.

Autre problème majeur : la voracité de Meta pour capter l’essentiel des revenus de ce qu’il croit être le nouvel Internet ou web3, a déjà entraîné la colère des développeurs. Et pour cause : pour lancer une application compatible avec les casques Oculus Quest, il faut obligatoirement passer par le Quest Store, le magasin applicatif de Meta dans la VR. Comme Apple et Google le font dans le monde mobile des smartphones, Meta s’octroie une commission automatique de 30% sur tous les achats, et prélève entre 15% et 30% de commission sur les abonnements. A cette taxe s’ajoute même la commission prise par Horizon Worlds, ce qui peut faire grimper le montant total de la commission à 47,5% !

Pour ne rien arranger au tableau, la Federal Trade Commission (FTC), le régulateur américain de la concurrence, a annoncé hier qu’il comptait bloquer l’acquisition de Within Unlimited, l’éditeur de l’app de fitness en réalité virtuelle Supernatural, par Meta. La FTC affirme que l’achat viole les lois de la concurrence, et elle accuse l’entreprise “d’acheter des parts de marché au lieu de les gagner au mérite“. Autrement dit, le régulateur s’oppose à ce que Meta reproduise dans le métavers la stratégie de croissance qu’il avait appliquée dans le secteur des réseaux sociaux avec les rachats de Instagram et WhatsApp. Une mauvaise nouvelle pour la suite du métavers de Mark Zuckerberg.

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